Dalaba : Immersion à Kebaly où l’agriculture bio se développe grâce à Elhadj Yaya Sow…

DALABA- Kébaly est l’une des dix communes rurales de Dalaba, une préfecture de la Moyenne Guinée située dans la région administrative de Mamou. Dans cette contrée historique du Fuuta, des initiatives innovantes naissent pour un retour à l’agriculture bio. Elhadj Yaya Sow, fils ressortissant de Dalaba y est retourné et pratique l’agriculture depuis 2015. Son approche se démarque par son originalité.

L’agriculture bio qu’il pratique se fait avec moins de mécanisation et sans engrais chimique. D’où une main-d’œuvre assez importante. Sur place, on constate de vastes de domaines de riz, de maïs et autres tubercules. Ses premiers pas ayant réussi, Elhadj Sow tente de déployer son expérience un peu partout dans sa localité. Il réunit ses concitoyens en groupements agricoles pour leur montrer une nouvelle méthode novatrice dans le travail de la terre. Reportage.

Des formateurs ont séjourné à Kebaly pour aider une centaine d’hommes et de femmes dans la fabrication des engrais organiques à travers le compostage ainsi que des biopesticides au détriment des produits chimiques. La vision est d’aider chacun à faire l’agriculture à moindre coût avec une santé préservée. Une idée toute originale.

Reversé dans l’agriculture depuis quelques années, Elhadj Yaya Sow, devenu président de la délégation spéciale de Dalaba, est à l’origine de cette formation à la fabrication et à l’usage des engrais bio en faveur des femmes et des hommes qui font l’agriculture à Kebaly.

« Quand je me suis lancé dans l’agriculture moi-même, j’ai décidé qu’elle soit bio sans usage d’engrais chimiques et ou des pesticides. Si vous observez mes champs, il y a une main-d’œuvre importante c’est grâce au travail bio. Je n’utilise pas la chimie et je n’ai pas trop recours aux engins mécaniques. C’est vrai j’ai des motoculteurs, mais j’utilise beaucoup la charrue. Donc j’ai pensé à inculquer ces idées à mes concitoyens. D’où ces formations.

 C’est vrai l’agriculture bio n’est pas nouvelle chez nous, ce n’est pas une nouvelle approche du tout. C’est juste un retour vers des pratiques anciennes mais très bénéfiques qu’on tourne le dos aux engrais. Je me rappelle quand j’étais petit à Labé. Avec le maïs, on coupait des feuilles pour poser au sol entre les pieds de maïs. C’était de l’engrais. Ensuite la bouse de vache, les fientes de poulet sont souvent utilisées. Et curieusement, il arrivait que ce soit les plus pauvres qui font l’agriculture Bio n’ayant pas de moyens pour acheter de l’engrais chimique, ils font recours à l’engrais organique, ce qui était très bénéfique. Parfois, il ne suffit pas d’avoir les moyens entre parenthèses.

D’ailleurs c’est quand je suis convaincu de la réussite de l’agriculture que je me suis lancé dedans parce que j’ai observé que beaucoup de productions se détériorent très vite quand on utilise l’engrais chimique tandis que de mes lointains souvenirs, je savais que les tomates pouvaient rester plus de deux semaines sans s’affaisser alors qu’avec les engrais chimiques, elles pourrissent vite », explique Elhadj Yaya Sow, président de la délégation spéciale de Kebaly.

Keita Aboubacar est chef de l’antenne régionale de l’ONFFP (office nationale de formation et de perfection professionnelle) de Mamou. Lui et son équipe ont contribué à la formation à la fabrication des engrais bio et les bio pesticides. Il témoigne :

« C’est un devoir de venir à Kebaly. L’initiative du président de la délégation spéciale a été remarquable vraiment. Kebaly a eu un responsable de commune visionnaire. Une vision qui va au-delà de Kebaly, parce que c’est un monsieur qui a le souci de protéger l’environnement. Quand il a compris que nous formons en Bio fertilisant, du coup il s’est mis devant au bénéfice exclusif de Kebaly. Donc à Kebaly les populations ont la chance d’avoir un président de la délégation spéciale qu’on ne retrouve pas partout. Un homme soucieux de l’avenir de ses concitoyens. Vous avez remarqué sur place nous avons produit des engrais bio et des bio pesticides.

Dans notre vision, la protection de l’environnement prend une place importante. Les actions en faveur du Bio visent à diminuer les effets secondaires de l’usage des engrais chimiques. Vous le savez, les engrais chimiques sont utilisés de façon abusive aujourd’hui. Des produits qui impactent la santé, l’environnement et même les finances. Après cette formation, nous espérons que les bénéficiaires vont beaucoup réduire les engrais chimiques et même leur dépense. Désormais ils n’utilisent que des engrais bio qu’ils peuvent fabriquer eux-mêmes. Ils savent comment avoir leur engrais et les bio pesticides sur place.

Les engrais sont à base de bouse de vache, des feuilles mortes et autres choses enfouies au sol, d’autres dans des caisses couvertes de plastiques pendant quelques jours. Présentement ils sont en train de finir la fabrication des bio pesticides qui permettront de lutter contre les insectes et des maladies qui attaquent les plantes. Dans la composition nous n’avons que des substances naturelles. Il y a du piment, des oignons et des feuilles d’acacia. C’est tout cela qui est transformé pour faire les bio pesticides » ; explique le chef d’antenne de l’ONFPP de Mamou.

Ingénieur agronome, Sow El Hadj Oumar Bella également conseiller technique agricole a, en plus de son expérience de plusieurs années dans l’agriculture, acquis toutes les notions pour la fabrication et l’usage de l’engrais et des pesticides BIO.

« Ce sont les expériences qui ont été renforcées ici. La formation tenue sur place est en 3 phases. La théorie, ensuite l’extraction de l’insecticide bio et la 3eme phase, c’est le compostage et la fumure. Les avantages de l’usage du bio sont énormes. Premièrement, notre santé est préservée, deuxièmement, le sol est protégé, l’environnement en général. Il faut même dire que le producteur, le consommateur et l’environnement sont tous protégés. Nous avons encore compris avec cette formation, que nous pouvons utiliser des choses qui sont autour de nous et à portée de main sans effets, alors que les engrais chimiques laissent toujours des traces. Depuis l’arrivée de la délégation spéciale, nous sommes honorés, nous bénéficions souvent des séries de formation avec ses membres » se réjouit-il.

Fatoumata Binta Diakité entretient un jardin potager ainsi qu’un champ de maïs, d’arachides et de manioc à Kebaly. Grâce à la formation tenue sur place, elle a désormais une piste pour entretenir ses productions.

« Nous sommes dans l’agriculture depuis longtemps. Avant, quand nous préparions nos domaines, on cherchait à nous procurer des engrais pour mettre dans les trous ou dans les billons, une fois qu’il pleut on plante où on sème.  A un moment de l’évolution des champs, nous trouvions une autre quantité que nous mettions autour des plants selon les espèces bien sûr, puisque certaines n’en avaient pas besoin. Nous venons d’apprendre par la formation que nous pouvons faire les meilleures productions sans engrais chimique. Les engrais organiques aident aussi à la conservation des productions pour une longue durée. Nous pouvons fabriquer nous-mêmes nos engrais et nos pesticides. Nous allons partager cette notion à tout le monde » s’engage-t-elle.

Abdoulaye Foula Sow agriculteur depuis très longtemps et d’autres ont bien assimilé le processus de fabrication des engrais et de pesticides bio. Des pratiques qui les épargneront désormais des dépenses énormes pour avoir des engrais chimiques :

« Ça n’a pas été vain de participer à ces initiatives. Nous producteurs agricoles, ne cherchons que des solutions à portée de main chaque jour. Des groupements sont venus acquérir des notions de fabrication des engrais tout comme des particuliers. C’est du passage de l’engrais chimique à l’engrais Bio, les produits chimiques ne sont pas sans inconvénients. Et nous avons perdu beaucoup de nos récoltes avec les engrais chimiques. C’est pourquoi la migration vers l’engrais bio a été bien accueillie ici. Voici le compostage que nous avons réussi à expérimenter aujourd’hui, c’est le fumier, les feuilles, les feuilles mortes et d’autres ingrédients que je n’ai pas cités. L’actuel président de la délégation était en avance sur nous.

À tout moment, il vient avec des nouvelles approches, maintenant il partage avec nous. Elhadj Yaya Sow réunit tout et puis il nous fait venir afin qu’on acquière des connaissances. El Hadj Yaya a toujours aidé Kebaly aujourd’hui président de la délégation spéciale, il fait plus. Cette fois nous avons bénéficié encore, nous sommes déjà en mesure de faire les engrais bio sur place » se réjouit ce producteur.

Binta Dieng, sociologue de formation, est là en tant que consultante. Après des jours passés aux côtés des femmes, elle rentre rassurée que si l’agriculture est bio et est développée, les consommateurs vivront avec moins de maladies graves.

« Avec la mondialisation il y a beaucoup de choses que nous avons copiées chez les autres mais le mieux c’était de copier le bon côté des choses. Allons dans les marchés où on retrouve des mangues, des tomates et beaucoup d’autres choses. Aujourd’hui tu ne peux pas mettre une mangue ou une tomate sur ta table sans qu’elle ne pourrisse, même chose pour les légumes et les tubercules. Pourtant il y avait peu de maladies. Je me rappelle ma grand-mère me disait quand il y avait un décès dans un village, beaucoup de temps s’écoulaient avant d’entendre qu’il y a eu un autre décès.  C’était souvent des personnes âgées. C’était une façon de me dire que grâce à la bonne qualité des produits sains consommés, il y avait une bonne santé.

Aujourd’hui c’est fréquent de voir des jeunes, même des enfants hypertendus ou diabétiques. La cause réelle, nous ne contrôlons pas notre alimentation. Ce que nous consommons est plein de produits chimiques dangereux pour notre santé. Si Kebaly décide de retourner à l’agriculture bio, ça sous-entend la nourriture bio également, je ne peux qu’être émerveillée. D’ailleurs chez moi j’ai proscrit les cubes Maggi. Je préserve ma santé autant que je peux. Ce retour au bio est salutaire. Je rentre avec des bonnes leçons. Ce qu’il faut rajouter c’est l’implication des femmes. Aucun développement n’est possible sans les femmes. Leur implication va porter », rassure-t-elle.

Docteur Seydou Dioubaté est un vieil ami d’El hadj Yaya Sow depuis le Maroc dans les années 1984-1985. Consultant en développement, il est venu à Kebaly pour partager des expériences avec son ami et apprécier sa nouvelle vie.

« Il n’y a pas de miracle, nous avons lâché ce qui nous est plus cher et la nature nous a lâchés. On s’est mis donc à chercher, à inventer, à improviser. Si nous ne respectons pas la nature d’où nous vivons, nous allons la détruire. Les conséquences reviennent à nous. Mobiliser aujourd’hui autant de femmes et d’hommes pour leur dire que le développement de Kebaly ne viendra pas d’ailleurs mais plutôt par eux-mêmes. D’où la nécessité de les mettre en synergie avec ceux qui ont appris des techniques avec celles qu’on avait reçues pour moderniser ce qu’on appelle l’agriculture bio, une agriculture qui prend en compte les recettes du terroir, les plus proches de vous.

Ces facteurs vous assurent une promotion socio-économique plus saine et plus respectueuse de l’écologie. Yaya Sow, on s’est connu au Maroc dans les années 1985, j’étais là pour mon doctorat, lui y était pour des formations militaires. Depuis nous avons gardé l’essentiel, l’amitié, la confiance réciproque. Yaya est un homme visionnaire en dépit des moments difficiles dans la vie. Il est revenu manager toutes ces femmes et jeunes hommes de son village. Ce n’est pas donné à tout le monde. Aujourd’hui cet homme fait des exploits partout » confie le Docteur Seydou Dioubaté.

D’autres projets de développement sont en cours en faveur de Kebaly. C’est comme le projet Kebaly ‘’COMMUNE VERTE’’ auquel tout Kebaly a adhéré. La fête de tabaski tournante de Dalaba se tiendra cette année à Kebaly, une occasion de partager davantage le contenu du projet aux communautés.

Alpha Ousmane Bah

De retour de Kebaly

Pour Africaguinee.com

Tel : (+224) 664 93 45 45

Créé le 1 juin 2024 09:27

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