Les « oubliés de la République » : Immersion à Niessou, en manque de tout…

MACENTA-Le district de Niessou est situé à 7 kilomètres de la sous-préfecture de Binikala et à 40 kilomètres de la préfecture de Macenta. Les habitants de nombreux villages qui forment cette localité vivent encore comme au moyen âge. Ils n’ont ni eau potable, pas d’école, pas de poste de santé, pas de routes. L’accès aux réseaux téléphoniques et aux ondes radiophoniques en modulation de fréquence est également un véritable casse-tête. Dans ces localités dépourvues presque de tout, les citoyens ont le sentiment d’être des « oubliés de la République ».

Niessou est composé de six secteurs, parmi lesquels seulement deux seulement abritent chacun un établissement scolaire de trois salles de classe. A pied, les enfants des autres villages parcourent plusieurs kilomètres pour rallier l’une des de ces écoles afin de se faire scolariser. Cet épineux manque d’infrastructures tue l’instruction des enfants dans ce district nous apprend-t-on. A cause de la distance, plusieurs enfants qui ont atteint l’âge de la scolarité peinent à aller à l’école. C’est le cas à Taninezou où les citoyens vivent cette situation avec beaucoup de peines.

L’éducation et l’instruction plus près de l’impossible

« Nous n’avons pas d’écoles.  Plusieurs de nos enfants sont non scolarisés ou déscolarisés à cause de la distance qui sépare notre village des deux uniques écoles qui existent dans tout le district. Seuls ceux qui ont un âge un peu avancé se rendent à Dogomai pour étudier. Même parmi ceux-ci, beaucoup abandonnent à cause de la distance. Aujourd’hui nous avons une dizaine d’enfants qui ne vont pas à l’école à cause de ça. Moi personnellement, mon enfant avait commencé à y aller mais au bout de quelque temps, il a été contraint d’abandonner parce que ses pieds lui faisaient mal. Ne pouvant plus tenir, il est donc resté à la maison », confie Kolako Béavogui, chef du village de Taninezou.

« Ici à Niessou, nous ne disposons que de deux écoles primaires de 3 classes chacune. L’une est à Niessou ici, l’autre est à Halabo. Les enfants sont dispatchés dans ces deux secteurs. Certains parcourent jusqu’à sept kilomètres pour y être. Pourtant les difficultés ne limitent pas à ce manque d’infrastructures scolaires. L’Etat n’a jamais affecté un seul enseignant dans ces deux établissements. Ceux qui sont là sont tous contractuels à la charge entière des communautés auxquelles ils sont liés par des contrats »? ajoute Pierre Woïwo Inapogui, chef de district de Niessou.

Niessou n’a pas d’eau potable

A cela s’ajoute le manque criard d’eau dans la localité. Ici les citoyens vont jusqu’à consommer l’eau de pluie recueillie et stockée directement dans des récipients à partir des toitures de maisons couvertes de tôles. Le district de Niessou dispose d’un seul forage qui date de l’an 2000. Ce point d’eau ne pouvant pas satisfaire tous les citoyens, certains villageois vont en brousse pour puiser l’eau de marigot pour les besoins vitaux.

Même scénario à Taninezou, où les populations sont obligées de filtrer pour obtenir de l’eau potable. A Worokpama, les habitants parcourent des longues distances pour se procurer de l’eau, parfois à partir de trous creusés dans des bas-fond.

’Nous sommes en manque criard d’eau potable. Nous souffrons beaucoup ici. Nous sommes complètement oubliés, pourtant nous sommes des guinéens nous aussi. Il fut un moment le gouvernement avait offert trois puits améliorés mais nous n’en avions pas bénéficié. C’est grâce à un fils ressortissant du village que nous avons eu un forage. Il s’est sacrifié pour que nous puissions avoir un point d’eau. Nous sommes deux villages qui partageons ce forage. Les gens quittent l’autre secteur pour venir chercher de l’eau ici. Ce qui fait que le forage tarit pendant la saison sèche.

L’eau finit pendant qu’on est en train de puiser. Nous utilisons aussi des cuves pour recueillir et stocker les eaux de pluie que nous buvons et utilisons pour d’autres besoins. Ceux qui étaient venus faire le travail, n’acceptaient pas de se laver même les mains avec notre eau. Ils sont venus avec de l’eau minérale. Quand ils se lavent les mains avec l’eau qu’on leur donne, ils prennent leurs sachets d’eau pour se laver les mains une dernière fois. Cela nous a vraiment prouvé que nous consommons une eau sale’’, explique Kolako Béavogui, chef du village de Taninezou.

’Chez nous, il n’y a aucun point d’eau. Nous partons dans les bas-fonds pour creuser des trous à partir desquels nous nous approvisionnons en eau’’, déplore Gbago Zoumaniqui, chef de village de Worokpama.

« Tout le district est dépourvu d’eau. Seul le centre a un forage, qui date du temps de la rébellion en 2000. Les citoyens vont dans des marigots ou dans des bas-fonds pour s’approvisionner en eau. C’est cette eau qu’ils boivent », précise Pierre Woïwo Inapogui, président du conseil de district de Niessou.

Il n’y a non plus pas de structures de santé et d’infrastructures routières ou de couverture de réseau téléphonique ou encore de médias à Niessou.

A ces problèmes cités ci-haut s’ajoute le manque de poste de santé et d’infrastructure routières. Il n’y a également ni de couverture de réseau téléphonique ni d’onde radiophonique. Les femmes en état de famille et les malades sont souvent transportés dans des hamacs vers la sous-préfecture de Binikala pour les soins appropriés. Faute de moyen de déplacement, certains malades perdent la vie à domicile témoignent des citoyens.

Kolou Koivogui en grossesse très avancée lance un appel pressant aux autorités

’Il n’y a ni centre ni poste de santé ici. Nous marchons sur plusieurs kilomètres pour rallier le centre de santé à Binikala. Nous demandons aux autorités de nous aider pour le problème d’eau, de route, d’école et de structures de santé’’, plaide Kolou Koivogui, une femme en état de famille très avancé, vivant à Niessou.

« Quand quelqu’un tombe malade, il faut aller chercher du carburant à Dogomai. Si tu n’en trouves pas, si ce n’est par l’aide de Dieu, ton patient risque de perdre la vie. Les routes que nous avons, ce sont nous-mêmes citoyens qui nous sommes battus à les faire entre nos différents villages », explique Ceze Zoumanigui, l’un des sages de Taninezou.

’Nous sommes très loin de la sous-préfecture de Binikala et de Macenta. Quand quelqu’un tombe malade, nous le transportons à travers un hamac à Dongomai où il y a un poste de santé. Dans notre zone, il n’y a ni station-service ni point de vente parallèle de carburant. Nous achetons le litre à 15.000Gnf. Il y a une antenne téléphonique à Binikala, mais elle n’est pas orientée vers notre village. Donc, notre village n’a pas de couverture de réseau téléphonique. Souvent, nous recherchons les coins couverts par le réseau perdu pour appeler. On n’écoute aucune radio ici. Là, il ne faut même pas rêver. Ce sont nos enfants établis dans les villes qui nous donnent des informations chaque fois que nous nous appelons’’, relate le chef de village de Taninezou.

« Nous n’avons pas de poste de santé. Si nous avons un malade il faut le prendre dans le Hamac pour l’envoyer à la sous-préfecture située à 7 kilomètres de nous parce que si par exemple la femme est en travail (état d’accouhement ndlr), tu ne peux pas la mettre sur une moto. Les femmes souffrent beaucoup. Par rapport aux appuis, on peut dire que le gouvernement nous a presque oubliés puisque depuis le temps colonial, nous n’avons pas d’appui. Pas d’assistance. Je veux dire au président, aux institutions et aux bailleurs de fonds de nous venir en aide. Surtout le problème de forage. Nous n’avons pas d’eau », lance Pierre Woïwo Inapogui, le chef de district de Niessou.

Les citoyens du district de Niessou vivent principalement d’agriculture. Mais la productivité est devenue très faible de nos jours, provoquant la sous-alimentation dans les villages en saison aride, soulignent-ils.

De retour de Macenta,

SAKOUVOGUI Paul Foromo

Correspondant Régional d’Africaguinee.com

A Nzérékoré.

Tél : (00224) 628 80 17 43

Créé le 24 juin 2024 10:20

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