Abdoulaye Bah, conseiller politique de Cellou : « L’inquiétude est là… »

CONAKRY-Dans un entretien accordé à notre rédaction, le conseiller politique du leader de l’UFDG a exprimé des inquiétudes sur l’incertitude qui plane sur le retour à l’ordre constitutionnel. Abdoulaye Bah qui prône le dialogue, rompu des lustres, appelle les autorités de la Transition à honorer leurs engagements de restaurer l’ordre démocratique, conformément aux engagements initiaux.

Dans cette interview, l’ex-Président de la délégation spéciale de Kindia s’est prononcé aussi sur les six ans de gestion de la Mairie de la capitale des agrumes par l’équipe dirigée par Mamadouba Bangoura. Selon Abdoulaye Bah, ce conseil communal n’a pas été accepté par la population, il n’a pas été suivi et il n’a pas eu l’expertise et la force nécessaires pour faire quelque chose. Entretien exclusif !!!

Www.Africaguinee.com: Bonjour Monsieur Bah ! Le 31 décembre 2024 c’est dans 6 mois. Mais la classe politique reste encore très désunie. N’est-ce pas un « pain béni » pour le CNRD ?

Oui, vous savez c’est de la lutte. Nous sommes dans un contexte où il y a une entité militaire qui a dit : Nous mettons fin à tout ce qu’il y avait. Ils l’ont dit à savoir : la démocratie déviée, l’administration caporalisée, la justice peureuse, frileuse et suivante. Donc prenez la corruption, la gabegie financière, le détournement de deniers publics et surtout le démantèlement du tissu social et de l’unité nationale. Donc c’est ça la transition. Ça a commencé par cela. C’est pourquoi les gens ont applaudi. Tout le monde a applaudi : les enfants, les jeunes, les adultes. Parce que c’est ce qu’on voulait effectivement.

Vous avez raison, les gens se regroupent, les gens se mobilisent, les gens sauvent les liaisons pour faire en sorte que la loi soit respectée.

Ça c’est tout à fait normal dans un pays où les acteurs politiques dont on parle notamment les forces vives ou les coalitions, si vous redemandez, elles vous le disent clairement. Nous voulons que les engagements pris soient respectés et que cela nous amène vers l’élection et que le peuple décide de choisir qui va être député, qui va être maire et conseiller communal et surtout qui va être président de la République Guinée. C’est ce que les gens réclament, mais vous avez raison. A cette date, nous sommes à six mois de la fin de transition. Très sincèrement, on ne voit aucun élément probant, tangible et objectif allant dans le sens de rassurer les populations guinéennes. Y compris les acteurs politiques et sociaux alors que cette transition doit impérativement et absolument prendre fin par l’organisation des élections. Sincèrement c’est ça l’inquiétude.

On nous parle du RAVEC, on nous parle RGPH 4 et tout. Ces opérations techniques qui exigent d’énormes ressources humaines et financières et qui prennent du temps, ce n’est pas lors d’une transition qu’on les réalise. Tous ces éléments-là peuvent être qu’à l’actif d’un gouvernement légitime. Donc oui, l’inquiétude est là au niveau des acteurs politiques pour éviter que le non-respect des engagements conduise à des incidents.  Concernant une nation de 12 ou 13 millions d’habitants, il faut discuter, il faut échanger, il faut se concerter pour s’entendre sur l’essentiel parce que quoi qu’il arrive il faut que nous vivions tous dans ce pays-là. Les autorités actuelles prendront conscience qu’elles ont pris l’engagement et qu’un engagement pris doit être absolument respecté.

L’ancienne équipe communale de Kindia vient d’être remplacée par une délégation spéciale. Quel bilan dressez-vous de la gestion de l’équipe sortante ? 

En tant que politique guinéen, natif de Kindia, j’avais de grandes ambitions politiques pour ma ville natale. Je voulais qu’elle soit la première à être développée en Guinée. Ce n’est pas une blague. J’ai vécu en Belgique durant 15 années, au Canada 2 ans. J’étais confronté aux municipalités, au développement à la base. Étant aussi politologue je sais qu’à travers la science on peut développer une ville en ayant un bon maire. Donc, je voulais à travers l’élection communale de 2018, saisir cette occasion pour insuffler le programme politique de l’UFDG sur Kindia, malheureusement, Dieu en a décidé autrement. Je ne reviens pas sur l’historique du président Alpha Condé et son parti qui ont, après les élections communales et communautaires de 2018, décidé tout simplement de sélectionner et d’imposer à la tête de certaines mairies des équipes qu’ils voulaient. Malheureusement, Kindia était le cas le plus spectaculaire, l’une des circonscriptions où la victoire de la majorité et de la démocratie a été confisquée en faveur d’une minorité.

Pendant 6 ans, ils n’ont pas été acceptés par la population, ils n’ont pas été accompagnés, ils n’ont pas été suivis, ils n’ont pas eu l’expertise et la force nécessaires pour faire quelque chose ne serait-ce que rembourser les bienfaits de leur bienfaiteur Monsieur Alpha Condé. Donc, le problème de ces délégations est né du sabotage du verdict des urnes. Six années perdues pour une ville qui ne mérite pas ça. Six années perdues pour une ville qui nécessitait le développement. Il n’y a rien eu, ni dans les quartiers, ni dans les districts. C’est donc un bonheur pour eux-mêmes d’être renvoyés de la mairie parce qu’ils étaient très embêtés d’être là sans être capables de faire quelque chose. La ville elle-même le montre. Mes propos sont prouvés parce que la ville ne montre rien comme bilan. Il n’y a absolument rien.  Ils ont quitté sans laisser quelque chose pour Kindia. C’est malheureux.

Désormais c’est Janko Cissé et son staff qui dirigent la commune. Comment ce choix est-il accueilli au sein de la classe politique et sociale de Kindia ?

Là aussi ils ont répondu à l’illégalité par une autre illégalité.  Je m’explique : la fin des mandats politiques donne automatiquement naissance à des équipes illégales si elles ne sont pas reconduites officiellement. Donc, on a enlevé des gens qui étaient là et qui ont fait les 5 ans et plus donc des illégaux, on les a remplacés par d’autres illégaux sur l’ensemble du territoire national. Pourquoi ?

Les mairies doivent être occupées et dirigées par des guinéens issus d’élections organisées dans le pays d’où la légalité de l’autorité et la légitimité de la population qui est appelée à choisir les gouvernants qu’on appelle donc les élus. Mais là, on a pris des gens dans des maisons, dans le quartier on a composé des équipes de délégation spéciale, pour en faire des équipes communales. Illégalité contre illégalité.  Au vu de la loi guinéenne, on les appelle délégations, en vertu de l’article 80 du code des collectivités guinéennes et suivants.

Pour qu’il y ait délégation spéciale conformément au Code des Collectivités guinéennes et sur la base des articles de loi, il faut en principe deux raisons. Premièrement, qu’un tiers des conseillers élus précédemment dans l’exercice en cours soit déclaré coupable. A ce moment-là, puisqu’il y a une diminution du nombre de conseillers, le préfet qui est la tutelle fait une proposition au Ministère de l’Administration du Territoire pour que celui-ci à travers le même préfet choisisse les remplaçants qu’on appelle membres de la délégation spéciale. Ou bien vous avez une contestation des élections au niveau du tribunal.

Si cette crise politique locale devient grave, l’État peut demander qu’une équipe spéciale soit mise en place en attendant que le tribunal tranche sur la question électorale devant lui.  Voilà les raisons susceptibles de donner naissance à une délégation spéciale mais tel n’est pas le cas. Donc, là aussi on a violé les lois guinéennes qui disent qu’à la tête des mairies, il faut absolument des citoyens élus par les populations locales. Ce qui n’est pas le cas pourtant les autorités pouvaient bien le faire en organisant les élections.  C’est très facile. On aurait préféré que Monsieur Doumbouya, président du CNRD, qui a promis de remettre la démocratie sur les rails commence par l’organisation de ces élections locales qu’il avait promises pour que la transition puisse au moins être plus ou moins acceptée. Tel n’est pas le cas.

Maintenant nous avons là pour le cas Kindia une équipe politique imposée qui n’a rien pu faire parce que ses membres n’étaient pas le reflet du scrutin électoral. Mamadouba Bangoura et son équipe sont partis à la maison sans honneur mais sûrement avec un peu d’avoirs parce qu’ils ont bradé le marché et nous avons encore là une autre délégation spéciale qui est en porte à faux total avec les lois guinéennes et même la charte de la transition. On va voir ce que cette équipe produire et présenter en termes de résultat.

Fin !

Interview réalisée par Sayon Camara

Pour Africaguinee.com

Créé le 30 juin 2024 10:16

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